19 Novembre 2009
Paris c'est mon centre. Le lieu où je fus, d'où je suis.
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L'enfant qu'alors j'étais,
erre aujourd'hui encore dans un de ces passages
qui, gueule ouverte,
vous happait sur les Grands Boulevards :
remugles insensés, toutes grilles sur la vie refermées.
Jour après jour, de porte à porte, je buissonnais.
J'avais à peine onze ans. Je portais un manteau de laine grise,
aux chevrons blancs, trop long,
une mèche, de son ombre, me barrait le front.
Dessin figé sur mon visage,
un sourire alors disait mes peines, mes questions.
Seul,
je marchais, des jours durant,
seul,
le corps fragile,
l'âme durcie, combien meurtrie parfois, pourtant.
Bravache,
au bout du bras je balançais mon cartable
où lourdement dormaient mes cahiers d'écolier.
La peur,
la peur au ventre, je la ressens encore,
la peur - la peur constante - d'être pris,
d’être de force remis entre ces murs inutiles
où grondait le devoir d'apprendre.
Moi, je savais tout déjà de mes vies à venir.
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Je donnerai presque toutes les années
qui impatiemment
encore m’attendent,
pour être,
juste un instant,
le reflet dans un miroir,
du visage de cet enfant
au regard perdu.
Je lui sourirais.
Ma main grifferait
le tain de la glace
la briserait.
Blessée, amicale pourtant, elle se tendrait vers lui.
Lui, timide toujours, mais au courage insensé, la prendrait,
par ses larmes, lavée.
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Puis réunis enfin, nous briserions toutes les grilles
Le sens de la vie nous serait raconté.
L’un serait l’autre et la main, par la même main tenue,
marchant à l'unisson,
seul, ensemble, nous irions par delà les vastes salles lointaines,
vers le sourire d’Orphée,
aux bras vers nous tendus,
au masque enfin brisé.